La peau – Blog de Papa Lion

Je ne sais pas trop comment faire pour l’anniversaire de ma fille que je n’appelle plus Bébé Lionceau tant elle mute en Grande Gazelle. Elle m’a demandé du roblochon, j’ai beau lui expliquer que ça s’appelle du reblochon et que ce n’est pas bon, elle n’en démord pas, elle veut mordre dans du roblochon, vu qu’elle ne mange pas grand chose j’ai presque envie de lui planter des bougies dans un grand reblochon qu’on partagera avec amour et s’il en reste elle le mettra dans son terroir pour le finir le lendemain matin. Elle voudrait aussi des légos et des robes et un stylo et des mandalas. Et un appareil photo, c’est l’effet mère, elle immortalisera l’éphémère et les rides, l’éphéméride moins quelques pages, faut que je me bouge et que je trouve mieux qu’un fromage de Savoie fluette. Un petit roblochon et un gâteau au chocolat et tout ira bien Papa. Elle votera pour moi aux présidentielles et si on gagne on repart à la montagne, fallait la voir à la montagne, gavée de neige, la luge, l’Eden, devant la maison la reine déneige à grandes pelletées vertes et dommage que les bonshommes aient fondu : on avait prévu de les ramener à la maison.

 

Un roblochon, des dobardeurs, une partie de Nomopoly et peut-être une consultation chez l’autophoniste tant elle dézingue les syllabes et c’est très bon parce qu’à chaque fois son frangin la reprend et moi je cligne de l’œil dans le vide en me disant qu’il faudrait l’enregistrer mais je n’ai jamais rien pour l’enregistrer. Quand ils repartent pour une semaine j’ai le cœur taillé en tout petits morceaux, pas celui à réécouter des extraits d’enfance alors je laisse retomber la sauce papa, je range la chambre, je dérange les légos dont elle est Friends et les plaies mobiles. C’est comme ça quand on a ses enfants à mi-temps : on en profite pour deux semaines et puis on range dans les petites boîtes.

 

J’ai des bons films d’elle, c’est classé dans des dossiers à la nomenclature oublieuse comme 2016 > Eté 2016 > Bretagne, des trucs qui mouriront puisqu’il faut bien mourirer un jour quand mon ordi aura enfin cané, une VHS aurait aussi mal fait l’affaire, HS. Ca ne sert à rien de prendre des photos, filmer est encore plus con, il vaut mieux s’en foutre plein les mirettes et les naseaux, cette odeur d’enfant qui ne s’est pas lavée depuis trois jours et qui pue bon, il ne faudrait plus qu’elle se lave pour que je garde son odeur de peau dans l’appartement quand elle n’est pas là, sa peau tiens faut en parler : elle voulait prendre des couleurs à la neige, elle avait dû entendre parler des couleurs qu’on prend à la neige, elle n’a pris que trois taches de rousseur sur ses belles joues vanille, j’aurais dû les prendre en photo mais je n’ai pas d’appareil photo, constellation sans consolation, j’ai mis de la crème sur son nez, c’est les dermatos qui disent qu’il faut le faire, alors je l’ai fait, ben je n’ai eu que du blanc et trois taches mal nommées. Elle est belle et j’en suis amoureux, cette petite fille c’est le nirvana qui ne sent pas encore le teen spirit. Ca viendra assez vite.

 

Un roblochon. Ben elle me coutera pas cher pour ses six ans, ma jolie gamine.

Ils foncent – Blog de Papa Lion

Ca se passe chez leur maman, Grand Frère Lion a dû faire son pénible comme il sait faire quand il fait son pénible avec sa petite sœur qu’il aime et qu’il n’aime plus, en fonction de ses jouets et sa propension à les lui prêter et quand on sait qu’elle les prêterait à la Terre entière des fois je trouve qu’il exagère en tout cas l’anecdote m’est racontée au téléphone et je ris à gorge déployée dans la rue, ça ne fait pas tellement de bruit parce que je suis un garçon discret mais j’imagine la scène alors j’essaie de la retranscrire. Elle est fâchée, il a dû la traiter de bébé, ça ne se fait pas, est-ce que je la traite de bébé moi ma Bébé Lionceau ? En tout cas elle fait la tronche d’après ce que je comprends ou j’imagine, elle snobine, elle doit minauder et pétassouiller un peu, le Cœur, trop belle tout ça, et voilà qu’il a envie de nouveau de jouer avec elle. Alors il présente ses excuses, c’est à la mode, tout était légal mais il présente ses excuses, il voudrait bien qu’elle rejoue avec lui et lui fait passer un petit mot. Oh, rien d’obséquieux, faut pas exagérer, c’est un lion, un fauve une bête, « excuse-moi tu veux bien rejouer avec moi ? » Il convoite sans doute un Légo Friends (foutu genre) ou le petit accordéon (genre foutu pour foutu), en tout cas la princesse des neiges ne dégèle pas : elle fait durer le plaisir, monter les enchères, pousser la concurrence, rend fou son petit homme de grand frère, ça se joue par petits mots griffonnés et punaise ce qu’il écrit mal, toujours est-il qu’elle ne sait pas encore écrire, son drame, sa croix, sa grande section, et puis alors que l’autre bave à sa porte elle demande à sa mère, l’air de rien, tout dans cet air, « NON, ça s’écrit bien N-O-N ? ».

 

Caractérielle. La guêpe qui fait mouche.

 

Ils étaient hier à Marne-la-Vallée, dans le grand parc à souris taille humaine, ils se sont régalés. Mais au téléphone tout de même Grand Frère Lion s’est étonné auprès de moi : pourquoi y avait-il autant d’adultes avec des oreilles de Mickey sur la tête ? Il a aimé les montagnes russes mais pas trop les touristes polygénérationnels, et ces hordes d’adultes dans son monde d’enfant. Il aurait bien fait le ménage dans les manèges, filtré les visiteurs par âge, au final il aurait voulu avoir le parc pour lui, sa sœur et sa maman, mais je crois qu’il a kiffé, et si j’ai bien compris il me revient avec un doudou Pluto qu’un magnet. On fonce, enfance.

 

L’enfance s’arc-boute et ça fera bizarre quand ça lâchera prise. Grand malin, petite futée, graine de star et princesse. J’ai encore la main et le nez sur les baisers esquimaux bientôt esquivés. Un dernier, dernier des derniers, et puis un jour le dernier. Des derniers. L’enfance pose des jalons. La partie est facile quand il faut dormir, je suis bienvenu dans le super lit superposé, on pourrait se superposer comme qui rigole et on rigolerait bien. Ah les belles promesses en attendant d’autres séparations. Daddy daddy I’m gonna leave you. Il ne faut pas aimer trop fort, il y a des déconvenues. T’es mignon, je peux témoigner. Moi si j’étais Mickey je mettrais des tartes aux adultes à oreilles de souris et je dévalerais le train de la mine avec des enfants que je choisirais parce qu’ils ont l’air sympa. Genre les deux miens.