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Le camping – blog de papa lion

Je me rappelle la toute première fois où nous sommes partis au camping avec les enfants. Les deux mois précédant notre départ, tous les jours, ma fille avait réclamé le camping, « et c’est quand qu’on part », « et c’est dans combien de jours », « et combien ça fait en semaines ». C’était il y a trois ans (cent-cinquante-six semaines environ). Dans la voiture, elle avait rongé son frein tandis que j’appuyais sur l’accélérateur. Mais alors que nous arrivions, elle s’était mise à pleurer. « Je ne veux plus aller au camping ». 

Point de caprice depuis et c’est toujours une fête d’aller dormir sous une tente, de faire la queue pour les douches sales et de se brosser les dents en regardant discrètement les autres dans le miroir moucheté. Nous avons beaucoup ri. Dans la voiture, nous avons écouté Jo Dassin, parce que je suis passionné de chansons ringardes et que je tiens à transmettre mes passions essentielles à mes enfants. On est allé où je voulais quand je voulais : dans les Gorges du Tarn, la semaine dernière. J’ai proposé aux enfants d’emmener le petit pédalo et ses personnages avec lequel ils jouent dans le bain – on est bébé jusqu’à qu’on ne le soit plus – il ont refusé, craignant de le voir emporté par le Tarn. Je l’ai quand même emmené, en douce. Et on a chanté pas mal de fois dans la semaine qu’il fallait envier l’éternel estivant qui fait du pédalo sur la vague en riant, parce que je suis aussi passionné de jolies chansons. 

Un soir, aux sanitaires (ma fille adore ce mot, « sanitaires »), des jeunes se brossaient les dents en musique, mais en musique de jeune. Pour être efficace on appellera plutôt cela une musique de merde et très fort en plus, la bonne vieille prise d’otage aux sanitaires, moi je n’avais pas très envie de me brosser les dents en écoutant des décibels injurieux. Ils n’étaient pas méchants ces jeunes, mais ils n’avaient pas bien lu le règlement intérieur. Visiblement je n’étais pas dans l’ambiance car ils m’ont demandé si j’aimais bien leur musique, comme s’ils connaissaient déjà la réponse et voulaient en débattre, ou peut-être voulaient-ils juste se battre. Avec pas mal de dentifrice entre les lèvres je leur ai demandé d’éteindre leur flow haineux. Qu’adviendrait-il de ma petite enceinte aux sanitaires du camping si je diffusais le Requiem de Mozart en me brossant les dents ? 

Un jour qu’il a pleuvait fort sur la grande route et que nous cheminions sans parapluie (celle-ci, ma fille la connaît par cœur, ce qui constitue sans doute une réussite éducative majeure), j’ai proposé aux enfants de taper le carton. Oui, une belote à trois, c’est possible. On s’est régalés. Mais vraiment régalés. Ma fille nous a écrasés, j’ai dit que c’était la chance du débutant, son frère a râlé car lui aussi débutait. Je lui ai confié un peu plus tard que la chance du débutant, c’était la façon polie de désigner les enfants qui gagnent alors qu’ils n’ont pas compris la moitié de la règle du jeu. Quant à moi, de toute façon, j’ai toujours été nul aux cartes. Pour faire le malin il a dit que c’était aussi le nom d’un animal, la belote. J’ai suggéré qu’il s’agissait sans doute de la belette. Ca n’a pas arrangé les choses. Alors pour le faire rire je lui ai appris le kilo de merde, je n’aime pas être grossier mais bon c’est comme ça que ça s’appelle, ce jeu, c’est le kilo de merde. Je me rappelle qu’enfants, nous appelions ça le pot de coquillages parce que nous y jouions à la plage et que nos parents veillaient au grain (de sable). Comme nous étions au camping, que nous ne sentions pas bon et que ma fille n’aime pas les gros mots, nous avons appelé ça le kilo de chaussettes sales, c’était délicieusement niais et parfaitement régressif, d’ailleurs ils n’ont plus voulu jouer qu’à ça et nous n’avons jamais pu rattraper ma fille à la belote. 

J’avais emmené deux livres : Jean de Florette et La Disparition. J’ai lu quelques extraits de Pagnol à mes petites galinettes et ils ont bien ri, surtout quand le Papet dit : « Mon pauvre Ugolin, que tu peux être couillon ». Je leur ai expliqué que La Disparition était un lipogramme en E, ils ont été très impressionnés, ma fille a essayé mais il y avait des E partout dans ce qu’elle disait, mon fils a jugé qu’avec deux E dans son prénom, elle partait avec un handicap. Elle nous a bien fait rire en suggérant que c’eût été encore plus drôle si Perec ne l’avait pas fait exprès. Tiens, d’ailleurs il avait deux E dans son nom lui aussi. 

Nous avons fait la connaissance d’un mec bien sympa, un Auvergnat qui sans façon nous a hébergé dans sa tente immense alors qu’il pleuvait fort. Il s’appelle Stéphane et ça a l’air d’être un super papa alors comme il avait l’air de me trouver bien sympa aussi on a bu quelques bières ensemble. Il s’occupe entre autres choses de faire couler l’eau fraîche dans une cité thermale, j’ai trouvé ça génial comme métier et je l’ai un peu envié. Si j’ai bien compris, il ne m’envie pas trop d’être enseignant. Il sait aussi replier les tentes surdimensionnées, et sous la pluie en plus. Et c’est un sacré mangeur d’aligot. C’était une bien chouette rencontre. 

Nous avons fait du canoé, j’y ai laissé mes lunettes de soleil (si vous raclez bien le fond du Tarn vers Sainte-Enimie, merci de me ramener mes Ray-ban), nous sommes allés à la crêperie, j’y ai laissé mon budget, et nous avons nous aussi replié les tentes sous la pluie et j’y ai laissé ma dignité. 

C’est vrai qu’ils sont plaisants, tous ces petits villa-a-a-ges, mais une semaine au camping c’est bien assez. Sur le chemin du retour, nous avons troqué Jo et Georges pour Serge. A chaque chanson, mon fils me demandait une analyse de texte. J’ai parfois été à court d’arguments. J’ai remis Georges ; de toute façon il s’était endormi. 

De retour à la maison, mes enfants m’ont remercié pour cette jolie semaine de vacances. M’enlevant ainsi les mots de la bouche. 

Dilili à Paris – Blog de Papa Lion

Dilili
Dilili est heureuse de faire de la corde à sauter.

On a vu Dilili à Paris, à Montparnasse pour être précis. J’étais avec mon fils et nous visitions la grande ville, devisions de la Belle époque et des verrières Art nouveau, alors je lui ai dit « allons voir le dernier Ocelot ».  Surtout, il avait bien aimé Kirikou nous avions deux heures à perdre ;  nous avons décidé de les gagner. Il ne confondrait plus Montparnasse et Montmartre, mon sacré petit cœur.

J’ai peu de souvenirs de Kirikou sinon qu’il n’est pas grand mais vaillant ça oui. Les élèves l’adorent. A mon avis c’est parce qu’il est toujours tout nu. Je me rappelle une grande sorcière qui lui cherchait des noises. J’ai vu plus récemment Ivan Tsarévitch et la princesse changeante, avec mes enfants puis avec mes élèves puis de nouveau avec mes enfants. Il y avait quatre contes en un et comme j’y suis allé trois fois j’ai vu douze contes en trois. C’était formidable, pas du dessin animé pour les gens qui rient fort et qui ruminent le pop-corn, oh ça non, c’était plutôt de l’artisanat, du home made, du man made, et même du self-made-man made à en croire Michel Ocelot qui avait eu la bonne idée d’assister à une des représentations à Nîmes pour nous en expliquer les ficelles en fin de projection : des bouts de ficelle, justement et, à l’en croire, trois chutes de papier, une paire de ciseaux, une chambre noire, un peu d’imagination, de bonne volonté, du talent, un cousin éloigné de Kirikou et paf, dans la boîte.

Nous venions de monter à l’arc de Triomphe, mon fils était de plus en plus titi, à la nuance près qu’un gamin qui colle son visage à la lunette avant des rames de métro automatique est forcément touriste. Mais je cultive sa culture. Dilili : j’étais enchanté, j’étais heureux de vous rencontrer. J’ai beaucoup aimé que Monsieur de Toulouse-Lautrec soit de la partie : cet été, ces deux-là n’avaient pas été très copains.

Réconcilier mon fils avec Monsieur de Toulouse-Lautrec

Dilili n’est pas grande, mais elle est polie. Avec les grands d’il y a cent ans et avec les petits triporteurs. C’est fin. La kanak n’est pas canaille. La caldoche en a plein la caboche. Nous visitions Paris et nous l’avons revisité avec Dilili, Paris revisité au goût du cinéaste : l’inconfortable triporteur faisant office de bus touristique et cahotant sur les pavés nous a bien promenés. Double lecture, pour les pas grands et les plus grands, et des procédés ciné confondant l’image et la photographie. C’était mieux que Paris, c’était la très Belle époque.

Mes enfants sont retournés voir Dilili, à Nîmes, avec leur maman. Mon fils l’a donc vu deux fois. Il aimerait y retourner. Il est amoureux de Paris. Il est amoureux du cinéma de Michel Ocelot. Je crois qu’il est amoureux de Dilili.

Depuis, ma fille est heureuse de me rencontrer dix fois par jour. Sa licorne aussi, son ours pareil. Ils sont tous heureux de se rencontrer et font la révérence. Monsieur Ocelot : « C’est extraordinaire. Quel bonheur d’être avec toi dans ton triporteur. »

Padam Padam Paname – Blog de Papa Lion

On a passé trois jours pleins en plein Paris, on ne va pas se plaindre. On a laissé la voiture près de la gare, Bébé Lionceau était inquiète, elle avait peur qu’on lui pique ses vignettes de supermarché, il en faut 52 pour avoir pas cher (à vérifier) un couteau aztèque, elle avait peur qu’on se fasse braquer la caisse pour des vignettes donnant droit à un couteau aztèque, alors elle a caché les vignettes dans le vide-poches qui contient eu égard à sa fonction tout ce qu’ont contenu toutes les poches de mes proches depuis 10 ans.

Le voyage, allez, s’est plutôt bien passé. Nous voilà à Paris. On s’est régalés. J’ai vu mes parents mon frère ma nièce et 10 millions d’autres personnes, c’était bien. On est monté à l’Arc de triomphe et on a descendu la Grande Armée, c’étaient les montagnes russes qu’affectionnait tant Napoléon. On a crapahuté, c’était bien, main dans la main. L’un avec ses grands-parents, l’autre avec moi puis vice-versa. On a vu le lapin du métro et le lion de Denfert. On a vu le petit chat des tontons et l’autre petit chat des tontons. On a cru mourir quand j’ai voulu rentrer à pied. On s’est amusé au Musée. Mon fils a dénombré les voitures aux moteurs hybrides.

Vingt ans à Paris, vingt ans loin de Paris. Je suis hybride. Mais les bouffées de thermique ont le bon goût de l’ancien.

Dans le train, le cœur déjà à la maison. Le voyage, retour, se passe dans l’autre sens. Je suis dans celui de la marche. On se tire. On se tire le portrait.

Portrait tiré. Porc traits tirés. Port très tiré.

Gare de Lyon, l’amateur qui aurait mieux fait d’en faire sa vie jouait Padam. Je n’y aurais pas prêté attention il y a vingt ans. Aujourd’hui j’entendais Paname. Ca doit être normal !

Dans le train encore, ma fille dessine un smartphone. C’est un Aphone 15. Il coûte tout de même quinze mille millions d’euros. Elle a téléchargé des explications. Une d’elle permet de télécharger des couteaux aztèques. Mais il manque toujours une vignette. Heureusement, arrivés à demeure ou presque, la voiture est toujours là.

Nouvel iPhone15. Mille millions d’euros. Une petite fortune. Sans les explications.

La preuve que c’est un vrai.

Jour après jour, nous complétons donc des collections.

Vacances à Albi – Blog de Papa Lion

On n’a pas hyper marché car il ne fait pas beau. C’est notre alibi. Nous sommes au supermarché d’Albi, dans le rayon dont on veut connaître tout un rayon, celui de la culture. Quoique tout soit question de nuance quand on est à la fois chez Michel et chez Edouard. J’arrête mon char : y’a pas mal de Girac (c’est un nom du coin) et très peu des autres. Mais nous cherchons plutôt de la lecture. Au coin des bibliothèques multicolores, les stéréotypes ont la vie dure : l’émotion est toujours aussi bonbon, l’aventure plutôt mentholée. Quant à l’étalon, il est forcément noir. Le veinard. Bébé Lionceau se demande bien quoi se fader, du rose ou du vert. Je pense très fort mon frère ! Je suggère à mon grand bébé de l’aventure pleine d’émotion, ou bien de l’action plein d’humour. Elle choisit finalement un documentaire.

Emprunté au blog « Fille d’album »

 

 

 

 

 

 

 

Et mon grand, mon petit, mon fils prodige, prodigue, spirituel et biologique: toujours à parcourir les rangées avec son doigt ; lu, pas lu, pas voulu, lu, pas lu, pas voulu. Le retour des troisièmes vacances du petit Nicolas volume 4 ? T’es gentil mais j’entre en sixième. Harry Potter ? T’es gentil mais ça fait peur. (L’essentiel étant que je sois gentil.) Je le sens perdu entre Renart et les calamars géants (sa sœur salive discrètement à l’idée qu’ils puissent être à la romaine). Il nage entre deux zoos et repart avec un bon. Un très bon, un voyage au centre de la Terre, pourvu qu’il forme la jeunesse. Quant à moi à qui il reste tant à lire, je change de rayon et même de braquet pour me planter devant les coffrets Girac . C’est un best-of ou l’intégrale ? Ca me paraît en tout cas surdimensionné. Je vais me dire qu’il a une bonne tête de con, ce Girac, quand mon bébé rien qu’à moi le reconnaît. « C’est Kendji ! » Oui ben quel tête de con. Je lui bouge les épaules au bel espagnol. Derrière, il y a un coffret de Claude François. Je le bouscule, il ne se réveille pas, comme d’habitude. Encore derrière, c’est Bénabar. Y’a des journées comme ça. Le « best of ». Vivement le best-off.  Pas trop envie d’entendre rimer pizza avec chipolata, je le cache derrière Girac. Je prends un Gainsbourg et un Brassens. J’aime bien les petits nouveaux.

Nous marchons quand même dans Albi. Visitons la cathédrale. Plantons devant le Jugement Dernier. Devant les sept péchés capitaux, audioguide à la main, main à l’oreille, je sens que Grand Frère Lion réfléchit. La gloutonnerie, c’est pas bien. Sa sœur appuie sur Pause, enfin sur Play, c’est le même bouton, ça la fait marrer de pouvoir téléphoner dans l’église. Elle me demande ce que c’est, la luxure. Je cherche le contrôle parental sur l’appareil.

Au Musée Toulouse-Lautrec, les enfants me mettent à l’affiche : ils sont hilares. Il n’y a pourtant rien de drôle bordel !

Nous rentrons au camping car il se fait Tarn. Dans la voiture, ma fille commence et termine son documentaire. Faudra y retourner. Mon fils choisit le CD de Gainsbourg, qui va et qui vient entre des reins et qui manifestement s’y sent bien. Il me demande pour chaque chanson ce qu’elle signifie, exactement. (Je regrette un quart de seconde l’immédiateté de Bénabar). Nous roulons, le ciel est lourd, la route est très belle.

Et puis Bébé Lionceau demande à son frère : « elle y est sur le CD Quand la musique est bonne ? », ; je me marre tant que j’en loupe l’entrée du camping.

C’est facile finalement de faire du pédalo sur la vague en rêvant.

Les urgences – Blog de Papa Lion

Il faut reconnaître qu’il a un peu fait le con dans la salle de sport, rien qu’en y entrant. Quelle idée. Il n’en pratique aucun. Rien n’haltère le plaisir de faire semblant. Il fait le con avec sa sœur, se désaltère un brin et reprend la fonte, il prépare l’été ? Monsieur Lego lève l’haltère et go, l’haltère et son alter ego s’entrechoquent. Entre les deux, tandis que je bois l’apéro en haut, un doigt s’intercale et c’est l’éclate.

On hurle en bas. C’est tout rouge, le sang qui ne fait qu’un tour. Nous partons en toute hâte aux urgences d’Apt.

Dans la salle d’attente, que des gens en apparence bien portants. C’est important, nous passons devant, le lange d’ange rouge sang nous fait passer devant. Que s’est-il passé ? Ben, Madame, avec un haltère…Il faudrait faire un peu de couture, un point c’est tout. Un ou plusieurs. L’infirmière assure et rassure et réassure que tout ira bien. Pompe quand-même le gaz hilarant, je ne me marre pas encore. Il repousse le masque. Tous ces praticiens en Crocs, c’est bien la seule chose hilarante dans cet hôpital pas Hill-top. Arrive un urgentiste flanqué d’un foulard de pirate et percé de partout. Fêlé en gros. Je suis tout à fait rassuré. Qu’est-ce que t’as fait bonhomme ? Ben, des haltères tout ça. L’ange est pâle comme un linge. Le lange prêté à son insu par la petite cousine est imbibé. L’urgentiste allume la télé en toute urgence. Ce n’est pas bon signe. C’est Gulli. A cette heure, des ados s’inventent des histoires d’amour, je sens bien que mon fils s’en fout, il préférerait qu’on éteigne. Ca me rappelle ma première nuit d’hôpital, il y a bien longtemps. Je pleurais de douleur, mon partenaire de cellule regardait le Bigdil. Vincent, la grosse gaffe.

Il faut recoudre, mais d’abord l’anésthésiste doit revenir à l’hopital. Elle vient de rentrer chez elle mais n’habite pas loin. Je sens que je vais me faire engueuler. Elle anesthésie à même la plaie. Je tiens la main, enfin l’autre, je caresse tous les cheveux. Qu’ils sont clairs ! Les quatre premiers points s’alignent, je suis digne, mais au cinquième il geint. A jeun, je pâlis à mon tour, m’assieds aussi, mon fils me tient la main, ça va.

C’est fait c’est fête. Le pirate s’éloigne, nous éteignons la télé.

Nous rigolons un moment. Une très vieille dame passe sur un brancard. Il me demande où elle va. Oh ben ça tu sais…je ne sais pas.

La dernière phalange est une houppette. Elle était une houppette. Elle est en sale était. Refaire du piano ? Pas de suite. L’enfant encaisse. Réécrire ? Pas de suite non plus. L’enfant jubile. Tranquille la dictée, comprends-je. Nous partons, je l’attache dans la voiture, ce serait idiot tout de même. Je lui couperai sa viande, le laverai le bras levé, nouerai ses lacets.

Nous rentrons. Mon fils n’a pas faim mais il se ressert deux fois de ces bonnes pâtes au tonton.

Nous rentrons même chez nous. Rencontrons un ponte qui se fout un peu de moi. Je dois être nerveux. Le piano ? Il en rejouera dans un mois ! Les points ? Il faut les ablater. Trop d’ablabla, me dit cet homme-là. Je suis bien rassuré. Mais pour le sport, décidément, c’est mal engagé.

Yourte, méchoui et Montessori – Blog de Papa Lion

On a tenté la yourte et on a appelé ça le yaourt. Ce n’était pas vraiment une yourte, du reste, selon des sources certaines qui ont dû parcourir la Mongolie dans une vie antérieure. C’était en Ardèche parce qu’on imagine mal une yourte en plein centre ville de chez moi et que chez moi c’est l’étuve et qu’il a bien fallu partir pour voir si, à défaut d’être plus verte, l’herbe est plus fraîche ailleurs. Elle l’était et du coup elle était plus verte. On s’est régalés, dans le yaourt et tout autour, en Ardèche. On a été accueillis par un grand type assez musclé mais bien coiffé, le genre qui a fui la vie citadine, vous voyez ? Il avait un sans-manche déchiré et ça n’a pas échappé à Grand Frère Lion qui portait en débarquant en Ardèche un joli t-shirt offert par ses grands-parents maternels, mais malgré le respect que j’ai pour les beaux t-shirts offerts par les grands-parents maternels, je lui ai enjoint de remiser le beau t-shirt pour son vieux marcel paternel. Qu’on n’ait pas l’air de trois cons. Y’avait aussi Carmen, c’est étonnant comme prénom, Carmen, en Ardèche, et ça sentait de plus en plus le citadin qui a tout plaqué pour l’Ardèche, Carmen, six ans, a pris le relais de son père et nous a fait découvrir le lieu. Un grand lieu avec pas mal d’animaux plus ou moins hospitaliers et plus ou moins bien enceints. Y’en avait une qui était bien enceinte pourtant, c’était la brebis, et y’avait aussi un agneau tout doux et tout juste et droit sorti du ventre de sa mère et qui attendait aux portes de la bergerie – les moutons semblent conjurer l’ennui, en Ardèche. Carmen avait prévu le biberon, elle l’a chauffé dans ses mains et a chauffé Grand Frère Lion : mets-y lui le biberon dans la bouche, toi qui viens de la ville. Mon fiston n’a pas eu tellement le temps d’hésiter, l’agneau tétait déjà, et quand il a fini de téter son lait il a tété un peu la main de Grand Frère Lion, qui a crié, alors on est partis. « Et la paille ? » a demandé Carmen. Quoi, il boit à la paille ? Ah, non : la paille, enfin le foin, Carmen était mignonne comme tout mais ça attendrait le lendemain: on devait investir la yourte dans laquelle son père avait investi. J’ai bien senti dans le regard de Grand Frère Lion qu’on pourrait éventuellement se recroiser en terrain moins hostile le lendemain, genre piscine ou toboggan.

« Et au fait, tu lui as donné un nom à ton agneau ?

– Méchoui.

– Ah. »

Pour une yourte, et Dieu sait que j’en ai vues (aucune, c’était ma première fois), cette yourte était confortable : lits, draps, ventilateur, électricité. Pour l’inconfort on repassera mais qui part en vacances pour de l’inconfort ? Non, le clou du spectacle, le nirvana bien grunge, le Graal sans odeur ou presque, c’étaient les toilettes sèches. Impossible à prononcer pour ma fille : les toilettes chèches. Je crois que Grand Frère Lion les a redoutées autant qu’il a redouté la boum pendant sa classe découverte. On a fait le tour du propriétaire locataire, je leur ai montré la chasse d’eau – sèche – et Bébé Lionceau a baptisé les lieux. Elle les a baptisés le pot de yourte. Mignon, non ? Son frère, lui, a décrété qu’à y être, là, dans le bad trip dad trip nature et découvertes, autant faire à la fraîche. Ce qu’il a fait pendant trois jours. Il se l’est joué bouquetin le petit ! Mignon, non ? Non.

C’était cuisine collective, à ne pas confondre avec la cuisine centrale, ça n’a RIEN à voir. Chacun fait son frichti, bio de préférence pour ne pas avoir d’emmerdes avec les proprios, on s’assoit autour d’une grande table et on se demande d’où on vient. Enfin, on le demande aux autres, même si l’on ne sait pas soi-même d’où on vient. Le premier soir c’était tendu, on s’est retrouvés avec un couple de médecins qui a tout plaqué pour ouvrir une école. « Ouvrir une école ? » ai-je fait répéter parce que ça me paraît fou d’ouvrir des écoles, surtout au mois de juillet, et l’ex-doc m’a expliqué qu’il ne s’agissait pas de n’importe quelle école. Non Monsieur : ce serait une école Montessori. Ah d’accord, donc, qu’on se comprenne bien, à défaut de s’entendre : tu as fait neuf années d’études pour ouvrir une école Montessori, c’est bien ça ? C’était bien ça.

Bon, je vous dresse le tableau pas du tout interactif : deux gosses très mal élevés vifs et sales nature, un papa malingre monté sur un t-shirt Banana Republic XXL décroissant, une maman névrosée enthousiaste. Alors, pour bien comprendre comment on peut plaquer des briques pour en faire des caisses, j’ai posé une question simple, après avoir longuement cherché les mots adéquats et le moyen de ne pas rire : « Pour quoi faire ? ». C’était limpide : ils prévoyaient de monter une école Montessori pour que les élèves parlent plusieurs langues. Je répète : ils veulent monter une école Montessori pour que des enfants parlent plusieurs langues. I say it again : they plan to create a Montessori school so that the pupils speak several languages.

Je me suis cru un instant dans un dîner de cons. Je dînais juste avec des cons. Preuve à la pluie (foutu climat ardéchois) : « Machine, tu as vu un tracteur tout à l’heure, mais tu n’as pas appelé ça un tracteur. Tu as dit quoi quand tu as vu le tracteur ?

– Un tracteur.

– Non non, ma chérie épanouie, tu as appelé ça autrement, tu as dit un autre mot. Tu as dit quoi quand tu as vu le tracteur ?

– Ben, un tracteur.

– Non, tu l’as dit en anglais. Comment on dit tracteur en anglais, petit ange dégourdi ?

– Ben, un tracteur. »

Nous aurions dû souper avec Méchoui.

Mais le séjour s’est bien déroulé parce qu’ils sont partis rencontrer la vierge Maria à Tatahoune. Ils ont cédé leur yourte à trois nanas raggamuffin flanquées d’une péquelette à tresses et là, on s’est enfin marrés. On a péché des carpettes à la rivière, on a fait du feu et on a joué au Scrabble. Grand Frère Lion s’est illustré pendant que sa sœur illustrait. Pas de wons ni de wus ni de coups de Trafalgar (nom propre, dommage) : le petit instruit cherchait le mot le plus long ; il ferait un malheur aux Chiffres et aux Lettres, à Les Chiffres et à les lettres, je ne sais pas comment il faut dire. La Chance aux chansons, tout ça. Bref, il est moderne, mon petit. On a téléchargé le Scrabble sur mon smartphone et on en a acheté un de voyage avec des lettres microscopiques. On va se poiler dans les Alpes !

Et puis on est rentrés parce que l’Ardèche, c’est cool, mais je n’y élèverais pas des agneaux, même pour le plaisir de porter des sans-manche déchirés. On est rentrés et les enfants m’ont reparlé de Méchoui. Mes deux agneaux m’ont demandé si on pourrait retourner le voir, l’an prochain. Je me suis demandé si c’était du lait de riz, dans le biberon. A Nîmes, on s’est fait du mouron. En Ardèche, ils se font du mouton.

10 jours à l’ouest – Blog de Papa Lion

On est partis en Bretagne et même si c’est plus tout à fait la Bretagne c’est quand même mon far west, at last, c’est à l’ouest et c’est très far de chez nous, far breton cela va de soi, poke Mamie Lion, Tonton Lion et tous les amateurs de flan aux pruneaux. C’est si loin qu’on est partis en avion et rentrés en train, les grèves c’est bien mais seulement sur le temps scolaire. « Dommage que Tonton soit pas  » ont dit les enfants, eh oui, l’amuse-cadet a raté le muscadet. On a crevette de froid puis de chaud, la Bretagne est une terre de contrastes. On s’est mis au bulot le cœur léger et à la palourde le beurre salé, palourde à propos de laquelle Grand Frère Lion s’est autorisé quelques bonnes blagues pas lourdes du tout. On s’est régalette complète et c’était bon.

Quoique c’était l’année des méduses et ça a quelque peu compromis les baignades du rejethon. Je ne sais pas quel sac plastique a glissé entre ses jambes de surfer à J+4, mais passé J+4, il n’a plus fallu lui parler de baignade. La faute aux méduses. Il en voyait partout, des méduses : dans l’eau, sur le sable, dans sa serviette, je lui ai dit qu’il y en avait sous son oreiller et il a jeté un œil. Il nous a demandé si ça nageait à la verticale ou à l’horizontale, les méduses. A J+9 qui était J-1 avant le départ, il a pris le taureau par les cornes et la planche sous le bras et est allé se baigner, surtout pour faire plaisir à Papi Lion qui commençait à se demander qui lui avait refourgué un petit fils pareil et vu que c’est à moitié moi j’étais bien content qu’il y aille, à la baille, vaille que vaille.

Façon Hossegor mais désireux de garder le cap breton, le surfait a décrété l’absence de vagues. Pas de vagues, pas de planche. Sans planche, il repasserait, mais plutôt l’an prochain. La fière sœur du surfer ne boudait pas son plaisir : elle s’est bien amédusée dans les vagues, Ponyo la méduse, hilare et la manière avec. Une vraie Bretonne de Nîmes en Loire-Atlantique. La Bretagne était toute bleue, c’était beau.

On fait des canaux quand ça caille, hac ! On fait des châteaux de sable émouvants, qu’on maquille à la truelle et on se marre à la pelle. Les grands-parents sont des maîtres nageurs, ma poule à la chair qui lui sied le mieux, mon poulet est d’un blond bronzé qui me fait chavirer. Beau, gosse, un muscadin avec un grain, de sable dans la croc, c’est la Bretagne, c’est tous les ans depuis dix ans. Je crois que c’est la vie !

(Il y a quelques années il était déjà question de Croc’s et de sable qui gratte. J’ai cherché ce qui y était écrit mais c’est perdu. Une histoire de grain de sable dans le Croc’s. Peu importe, rien n’a changé.)

 

La fusée et le hibou – Blog de Papa Lion

Il suffit que Mickey titre « Spécial vacances » sur son numéro spécial vacances pour que je m’y voie un peu, je pars faire un tour de ville avec les enfants, au terme de notre rotation nous revenons plein d’emplettes et de projets pour l’après-midi : nous allons peindre, comme les jours où il pleut, pas grave, nous allons peindre deux tirelires. Une pour chacun et nous répartirons la somme accumulée dans feu la tirelire commune (une commune boîte en plastique) entre les deux petits épargnants. Ce cochon de cochon nous réserve une bien mauvaise surprise : l’usufruit pourri est estimé à 14 euros et 25 centimes. L’aîné pas de la dernière pluie propose d’en garder 7 euros et 13 centimes, abandonnant 13 euros et 12 centimes à la frangine. Je trouve ça injuste donc j’acquiesce. Nous arnaquons l’ingénue de Génie.

Il s’agit d’une fusée et d’un hibou, ou peut-être s’agit-il d’une chouette, moi je dis chouette, mon grand dit hibou, ma petite dit chouette, un hibou. Ca ne loupe pas : la fusée du grand sera aussi celle de Tintin. J’orthogonalise en ellipse, je me démerde plutôt pas mal, je dirais même plus : je me démerde plutôt pas mal. Je dis qu’on aurait dû acheter du vernis, mon paresseux me dit que ce n’est pas la peine, ma dernière qui n’est pas la dernière suggère qu’on appelle sa maman : du vernis, elle en a de toutes les couleurs.

Nous peignons. Mets de la matière, asséné-je, mets de la matière. Mon fils me demande quel aurait été le prix de sa tirelire si il s’y était trouvé 2000 euros dedans. Pour la première fois de ma vie, donc de la sienne, je trouve qu’il dit un truc idiot. Je lui fais remarquer que c’est idiot, elle aurait valu 2000 euros. Ben non, c’est sans compter le prix de la tirelire. C’est pas idiot. Je lui dis de remettre un peu de matière.

Nous sommes interrompus par des hurlements émanant d’éminents manants. Une maman hurle après son fils : « Quand on aime sa mère on dit pas qu’elle est grosse, si tu m’aimes tu me dis pas que je suis grosse ». Faut reconnaître qu’elle ne laisse pas beaucoup de place sur le trottoir, nous on s’en fout on est au balcon, quel spectacle que ce bal con. La rue est à eux, ils sont à leur déplaisir, nous ricanons, ce qu’on est bien là-haut. Refermons la parenthèse et la fenêtre, il faut de tout pour faire immonde, remettons un peu de matière.

La fusée est fuselée. On est à bout du hibou. Mon cadet cadeau regrette que ce ne soit pas plus lourd : j’essaie de lui expliquer que l’argent, c’est du temps. On en a (du temps), ce sont les vacances. Ca joue avec la fusée, « vvvvvou ! », mieux vaut pré-vernir que guérir : la peinture rouge s’épaillette un peu partout dans l’appartement, un coup de Frank Wolff ? Un coup d’éponge, je ne suis pas verni.

Salaud.

Nous sommes en vacances ou presque. On boit frais, on mange cru. L’ainé fin regrette que les jours diminuent déjà, je ne sais pas de qui il tient ça. Tiens, aujourd’hui en classe, nous avons rechanté toutes les chansons que nous avons apprises depuis le début de l’année. Un élève que je n’imaginais pas si sentimental m’a dit avec un grand sourire que ça lui donnait envie de pleurer tellement c’était bien, le début de l’année. Je me le suis rappelé en début d’année, quand il me donnait envie de pleurer tellement c’était pas bien quand il mangeait sa colle. Cours ministral sur la nostalgie. Je leur ai dit qu’ils me manqueraient. C’était très exagéré.

Revenons à mes moutons : Michel Delpech et sa fusée hergiaque, Shakira qui bout. Quand je les dépose à l’école, le grand me tient la main et la petite à l’écart. L’un génie, l’autre génue. Le bédéphile et le bébé file. La boule à mimiques ne mange rien, l’autre affamé bouffe dans ses pantalons. Les aimants m’attirent.

Le week-end touche à sa fin. Je dépose et je dispose. Demain les vacances.

le CP – Blog de Papa Lion

 

Bébé Lionceau entrera l’an prochain au CP et l’an prochain c’est cette année, du coup elle veut déjà lire et comme je ne lui apprends pas à lire elle s’impatiente et se demande bien ce que je peux faire dans ma classe de CP si je suis incapable de lui apprendre à lire, mais en fait je ne veux pas lui apprendre à lire, je voudrais qu’elle profite à mort de ses dernières semaines de maternelle parce que c’est la belle vie et que ce sont aussi les miennes et que je n’aurai plus d’enfant en maternelle, elle ne se rend pas compte ce que c’est, ça, pour un papa, plus d’enfant en maternelle, c’est un siècle pour elle, du sable pour moi, ça lui tarde, je lambinerais bien, les devoirs l’appellent, les devoirs à la pelle, ma poule, ne me font pas très envie. Elle lira et quand on lira tous les trois je ne servirai qu’à mettre le ton.

Elle voudrait bien aller dans mon CP.  Oh malheur ma poulette, si tu savais. Elle voudrait que je sois son Maître, mais je suis ton pèèère, comme il paraît qu’on dit dans un film qu’il paraît qu’il faudra bien que je regarde un jour. D’ailleurs elle a eu un Maître cette année, genre mon âge selon elle, genre dix ans de moins selon moi, genre taillé comme une saucisse selon elle, genre taillé comme moi selon moi, genre génial selon elle, genre un peu pas terrible selon moi. Mais je ne la prendrai pas chez moi parce que ça bouge un peu trop ma poulette, et puis il faudrait m’appeler Maître et je n’ai pas très envie qu’elle m’appelle Maître, ni qu’elle m’appelle Papa devant les copains. Ceci dit j’ai des élèves qui m’appellent Papa, le lundi matin quand ils n’ont pas bien fait la coupure, j’en ai aussi qui m’appellent Maman, ça fait rire tout le monde, moi je trouve ça chouette, je joue la Maman du coup, mais c’est rien, rien comparé à ce que m’a dit un jour mon pote Julien : un jour, ben y’a un élève qui l’a appelé Mamie. Ca c’est magique et ça, on me l’a jamais fait. Mais j’en rêve la nuit et je trouverais ça drôle que ça m’arrive tant que je ne suis pas trop vieux.

Chez moi mon cœur, quand les élèves sont polis, c’est en général qu’ils espèrent récupérer leur spinner ou qu’ils veulent retourner dans leur classe dont ils ont été bannis. On dessine des bonshommes patates parce que les bonshommes c’est rien que des patates. Enfin je sais pas, j’imagine que c’est pour ça. En même temps Grand Frère Lion en est encore aux bonshommes patates, et pourtant il est intelligent, enfin ça c’est un autre sujet. Dans mon école ma petite patate, peu d’élèves savent que la patate, c’est pas loin d’être une pomme de terre. Je leur apprends des trucs incroyables.

Elle me croit sévère mais je ne suis pas si terrible. Elle me croit bon Maître mais je ne suis pas si terrible.

Chez moi petite caille, les élèves se battent dans la cour, c’est leur récréation parce qu’en classe ils n’ont pas le droit. A les entendre, les mamans feraient toutes le même métier et on n’entend pas beaucoup parler des papas. On prête du matériel à longueur d’année, t’y crois ça ma grande ? On prête des crayons à longueur d’année. Et même, des fois, souvent, il y a des élèves qui embarquent le matériel de la classe. Ils disent que c’est à eux, même quand c’est écrit CP dessus et que c’est moi qui l’y ai écrit.

Elle fera sa lecture et dira B-A et puis BA. Elle comptera jusqu’à 100 et apprendra quelques trucs qu’elle sait peut-être déjà. Elle ne fera plus motricité parce qu’elle fera sport. Elle produira de l’écrit bien que je la trouve un peu jeune pour déjà produire. Mais elle ne fera pas de sciences, ah ben non, au lieu de ça elle questionnera le monde. C’est con ça, « questionner le monde ». Mais ce que c’est con ! Oh les programmateurs, vous n’avez rien d’autre à foutre ? Quand je pense qu’ils sont payés. Quand je pense qu’ils sont mieux payés que nous.

Elle pourrait faire tout ça dans mon école mais bon, c’est un peu dommage et pas très républicain, mais elle en ferait beaucoup moins que dans la sienne. Alors elle restera dans la sienne.

Elle joue à l’école avec son frère dans leur chambre, ils font une belle paire d’instits et je consens à jouer le rôle de l’Inspecteur. Je frelate des cordes vocales et des grands principes, je condescende, je bureaucrate. Je prends dans ma chambre les doudous qui ne se tiennent pas bien, bon ce n’est pas vraiment le rôle d’un Inspecteur, un Inspecteur serait bien emmerdé avec un enfant qui se tient mal, mais pour leurs doudous pas si vilains je fais l’effort.

Dans mon vrai métier j’ai un élève un peu pénible et un peu débile aussi, entre nous on peut se le dire, franchement il est débile, c’est pas parce que c’est la fin de l’année hein, dès le début je savais qu’il était débile, et qui me réclame encore, à la fin de son année de CP, de chanter les petits poissons dans l’eau qui nagent nagent nagent nagent. Pas trop dur à accompagner à la guitare, mais terriblement aquatico-niais. Je voudrais qu’elle ne le croise jamais dans sa vie. Alors oui, je ferai l’impasse et me résigne à n’avoir toute ma vie que les enfants des autres, dans ma classe. Et dans ma chambre, les doudous malins.

Les Pifises – Blog de Papa Lion

Je lui ai pris Pif un peu au pif et aussi parce que les unes macronisantes ne le tentaient pas plus que ça et à sa sœur le dernier numéro de Schtroumpfs parce que ça la schtroumpfait pas mal avec les gommettes en plus tu m’étonnes. Je lui ai fait l’article, faut dire que y’en a de bons dans Pif, en tout cas dans mon souvenir car Placide ne m’amuzo plus depuis longtemps. Je lui ai dit que les gadgets c’était de la crasse, il m’a cru et du coup il l’a pris. J’ai pour ma part choisi la Une macronisante. La Une à Nîmes qui ne m’a pourtant pas tellement convaincu.

Quand j’étais gosse mes parents ne voulaient pas que je prenne Pif parce que les gadgets étaient foireux. Ils craignaient aussi que l’hebdo m’adhère au Parti communiste. Il faut reconnaître que Georges marchait pas droit. En tout cas mes pièces de 10 francs n’auront pas suffi.

Je lui ai parlé du passé mais pas du PC. Il avait le pif collé dessus, mon sympathique sympathisant, alors il l’a pris. Pour l’avion, et pour les Pifises.

Je lui avais bien dit que c’était de la crasse. J’ai ricané quand il a versé sa poudre de Perlimpinpin dans l’eau, pourtant Perlimpinpin est un Dieu toujours vivant. Il s’attendait à voir plein de petits copains apparaître, tendre enfant solitaire, des petits Pifises dans l’appartement, nous voilà bien. On est partis en voyage et ça nous a fait l’avion puis tout le séjour : quand on reviendra, les Pifises…si ça se trouve, y’en aura partout des Pifises…on ne pourra peut-être même pas ouvrir la porte, tellement y’aura de Pifises…ils auront peut-être descendu les bières de Papa, les Pifises…ils auront éventuellement croqué tes doudous, les Pifises. Là c’était moins drôle d’un coup.

Ben c’est pas de la blague, en rentrant chez moi quatre jours plus tard, je me suis quand même demandé s’il n’y aurait pas une ou deux larves dans l’eau. Mais non, rien. Les enfants étaient déçus.

On est passé à autre chose mais il ne fallait surtout pas vider l’eau, au cas où, et on a quand même versé la deuxième poudre magique, au cas où aussi, la poudre qui alimente les Pifises mais qu’il ne fallait surtout pas verser dès le premier jour mais seulement une semaine après, d’ailleurs ça ne faisait pas tout à fait une semaine et Grand Frère Lion commençait à se demander si allait marcher et je commençais à me dire qu’il était temps qu’il se pose véritablement la question. J’ai gardé la flotte avec rien dedans, les enfants sont partis, je suis resté avec mes Pifises parce que je n’arrive pas toujours à passer à autre chose. Et que les enfants sont « trop petits pour être malheureux », comme dit la chanson chérie.

J’ai vu plein de trucs depuis qu’ils sont partis : des gamins jouer du piano sur Facebook et ils jouent super mal, des gamins dans les parcs et ils crient très fort, des gamins des autres que j’aime beaucoup et que je ne suis pourtant pas allé voir, finalement, et je m’en suis voulu parce que ce sont les seuls gamins que j’accepte de faire rire quand les miens ne sont pas là. Et aussi des gamins en photo, c’étaient les miens.

Alors j’ai fait le ménage. Les Lego dans la boîte à Lego. Le Pif Gadget dans l’étagère ad hoc. Le capitaine Haddock dans les tas « G.R. ». Les prospectus dans la pochette à souvenirs et les dessins dans la pochette à dessein. J’allais vider l’eau mais j’ai vu un Pifise mort né, enfin un Pifise quoi, je n’allais pas le foutre en l’air, faut pas foutre en l’air, faut foutre en l’eau, vite la deuxième poudre magique, fantasme néonatal ou délire prélétal je ne savais pas bien, je n’ai pas tout versé parce que je me suis souvenu que lui non plus il ne finissait jamais ses biberons, et là fallait reconnaître qu’il y avait bel et bien un copain qui flottait.

J’ai quelques amis qui flottent en ce moment.

Je l’aurais volontiers pris en photo pour l’envoyer à mon gamin, petit ami des larves, mais c’est con un Pifise : c’est translucide.

En transe mais lucide j’ai dû faire un choix : garder le Pifise, le nourrir, et avoir enfin un petit copain sympa pour mon gamin, ou bien l’abandonner au tout à l’égout. Le garder c’était bien parce que pour une fois, un gadget Pif aurait duré plus d’une semaine, mais le garder c’était s’attendre à le voir claquer (voir la taille de l’ersatz de pseudo crevette) et imposer un deuil difficile à mon fils. Mon p’tit fils, son Pifise, quitter l’un, garder l’autre, je n’y comprenais plus rien.

Alors j’ai reversé un peu de poudre dans l’eau, en attendant le lendemain.