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6 ans – Blog de Papa Lion

Bananes infectes : du coup je me suis gavé.

Puisqu’elle a six ans c’en est fini des caprices et d’ailleurs elle se douchera sans que je l’aide. Elle l’a dit quand elle avait 5 ans, c’était avant-hier. Nous avons fêté son anniversaire chez sa maman hier après-midi, j’ai été le premier invité à arriver, elle m’a ouvert la porte en ricochant dans tous les sens, genre salut je te préviens je suis super excitée, d’ailleurs j’avais des fleurs à la main, pour elle et pour sa maman et même une fleur coupée pour son grand frère, ça ne l’a pas calmée, elle m’a dit qu’elle allait les mettre dans un peu d’eau, je crois qu’il faut être grande pour dire un truc comme ça : « je vais les mettre dans un peu d’eau ». Elle a demandé un vase à sa mère, c’est certain : elle avait changé pendant la nuit. Enfin elle était quand même très excitée : ils arrivent quand ?

Ils ont fini par arriver, c’est marrant les gamins de 6 ans parce que c’est tout content d’arriver mais ça ne veut pas forcément entrer, il faut tendre un peu la main et ma grande fille a été très accueillante, elle a montré les fleurs à tous ses copains. Ils ont eu l’air de trouver ça bizarre comme cadeau, des fleurs. « Bon ben… » ont-ils tous eu l’air de dire en tendant leur propre cadeau à ma fille, et on a dit un peu pareil à leurs parents pour qu’ils s’en aillent : « bon ben… ». On a pris les numéros de portable au cas où, d’ailleurs on peut se demander au cas où quoi, mais enfin c’est l’usage, comme « merci et bon courage – Pas avant 17h30 hein ».

Mais on ne les a pas tous raccompagnés à la porte, la maman des jumelles nous a fait un drôle de caprice, elle a dû sauter son anniversaire des 6 ans celle-là, quoi qu’il en soit elle a d’abord sorti deux paires de chaussons pour ses fifilles, faut reconnaître qu’ils étaient pas mal, Reine des neiges et compagnie, on s’est regardés un peu amusés avec la maman de Bébé Lionceau et de Grand Frère Lion, parce que les trucs amusants ça continue de nous amuser beaucoup, mais on a moins rigolé quand la maman des jumelles a sorti une troisième paire de chaussons : les siens. Des chaussons Reine des … , et la voilà sur le canapé à jouer avec les enfants, surtout les deux siennes. Bon. J’ai eu peur qu’elle donne toutes les réponses à la chasse au trésor mais non, elle a tenu sa langue et son téléphone portable.

C’était chouette en tout cas. Je n’avais plus mangé de banane Tagada depuis trente ans : c’est infect ces machins là et j’en ai quand même mangé plusieurs. C’est infect et on s’en rend compte après coup. Alors que les fraises, elles, sont toujours excellentes. Et de saison.

Et puis ça a été 17h30, la maman des jumelles a rangé les trois paires de chaussons dans son sac et remis ses bottes, elle a au l’air d’avoir passé un très bon après-midi. Les enfants se sont bien poilés et nous n’avons pas déploré le moindre dégât matériel ni humain. Mes enfants ont une maman formidable. Avant de partir, une maman m’a demandé, à moi, si ça faisait longtemps qu’on habitait le quartier. Je lui ai expliqué que je n’habitais pas là. « Bon ben…merci » et puis elle est repartie.

J’ai un peu aidé Maman Lionne à ranger, mais enfin je ne savais pas trop où ranger les choses, et comme j’étais venu sans mes chaussons il a fallu repartir. « Bon ben…merci ».

Bon ben de rien. On s’est souri et puis je suis parti.

D’ailleurs, pour une fois, ma fille ne m’a pas demandé de rester. Je crois qu’elle a 6 ans, maintenant.

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( Comme les premières années du blog ont disparu, voici ce qui s’était passé pour les 6 ans de Grand Frère Lion. C’était il y a plus de trois ans, en décembre 2013.

Mercredi dernier, la maison était the place to be. Grand Frère Lion nous avait gonflés pour qu’on mette des ballons partout et qu’il y ait des jeux comme l’année dernière. Jeux, jeux jeux, je lui dis, mais enfin, il n’y en a que pour toi : non, il répond, pour moi et mes poteaux. Alors nous lui avons concocté l’anniversaire qui lui assurer sa réputation de petit mec le plus cool de sa classe de CP.

Ils sont arrivés bien à l’heure et tout timides. N. a mis sa plus belle robe et M. son plus chouette jogging. En guise d’amuse-bouche, le garage et la dînette ont fait sensation. Puis ça a été la queue de l’âne (le remake de l’an dernier, mais une valeur sûre), la pêche à la ligne (idem) et enfin l’atelier marque-page, l’occasion pour moi de sortir ma plastifieuse qui va m’assurer la réputation du papa le plus cool du CP, sauf auprès de M.A. qui depuis le début préférait continuer sur les petites bagnoles. Les marque-page plastifiés, Grand Frère Lion nous a demandé de sortir la patoune – là, sa réputation de mec le plus cool a pris un coup dans l’aile, ils l’ont tous regardé en écarquillant les yeux, c’est quoi la patoune ? Ben la pâte à modeler, balance-t-il. Ouf, ils ont ça trop cool comme nom, la patoune. Sensation, là encore. Oui, patoune, petites voitures et dînette pour des gamins de 6 ans. Je crois que le mercredi leur fait du bien (n’en déplaise à celui dont « la réforme…s’il savait etc. »).

Et enfin a sonné l’heure du gâteau et des cadeaux. Les cadeaux, les cadeaux, j’ai lancé, et ils m’ont tous suivi. Grand Frère Lion a ouvert ses cadeaux soigneusement, a dit ouah pour chacun, a eu un mot gentil pour chacun et a fait un bisou à chacun, sauf à M.A. qui a préféré qu’on lui serre la main, c’était bien mignon tout ça. Alors j’ai fini par dire que c’était bien mignon tout ça, mais que si on mangeait ? Le gâteau, le gâteau j’ai lancé, et ils ne m’ont pas suivi parce que Maman Lionne arrivait déjà dans le salon avec son gâteau de fou. On a quand même chanté Joyeux anniversaire en français, en anglais, en espagnol, en portugais et en arabe. Sauf M.A. qui a chanté Papaouté. On s’est régalé, et puis ils sont tous partis se laver les mains et se sont remis à jouer, jouer, mais enfin ils ne pensent qu’à s’amuser ces petits ? Ben oui.

Et ça a été l’heure des mamans. M.A. a haussé les épaules quand sa maman lui a demandé si il s’était bien amusé. D. a dit à son père qu’il devait acheter une plastifieuse, mais le père était en warning devant la maison, je ne sais pas s’il a été d’accord. N. ne voulait plus partir, elle en a pleuré. Comme il a fallu la consoler, ça a pris du temps, Grand Frère Lion lui disait qu’elle pourrait revenir quand elle voudrait et ça la faisait encore plus pleurer, alors j’ai fait un peu plus connaissance avec sa mère et avec celle de S. Elle sont plutôt sympa ces mamans. Elle sont toutes voilées, je voulais leur poser plein de questions sur le voile : si elles le portent chez elles, si elles le portent sincèrement par plaisir, ce qu’elles pensent de Maman Lionne qui a les cheveux tout lâchés, si N. et S. devront en mettre un sur la tête quand elles seront plus grandes. Mais enfin nous ne sommes pas si intimes. Et puis je voudrais que N. et S. reviennent l’an prochain, alors j’ai remercié leurs mamans d’avoir gâté Grand Frère Lion et leur ai poliment serré la main. L. voulait bien partir, elle, mais c’est son grand frère qui voulait rester, et sa mère aussi qui nous a bien pris le chou avec ses charges contre la maîtresse. Elle nous avait déjà fait le coup l’année dernière : les maîtresses mettent soit disant la barre trop haut. Nous avons peiné à nous en débarrasser, ainsi que du fils ainé qui ne se lassait pas de confectionner puis cuire des gâteaux à la patoune dans le four de la dînette et à qui je me suis surpris de dire qu’attention, la grille était sans doute chaude. Mais enfin ils sont tous partis, nous nous sommes retrouvés enfin seuls avec nos milliers de miettes de patoune à balayer, la plupart déjà sous nos semelles ce qui faisait toujours ça de moins à ramasser.

Grand Frère Lion nous a remerciés. Il était content d’avoir ses potes. Il n’a pas toujours été comme ça, Grand Frère Lion. Mais à six ans, il est encore souvent dans son monde, notre fils. Le voir dans son univers nous a fait du bien. )

Des marrons dans la tronche de Chou Papier Toilette – Blog de Papa Lion

marrons

Une figurinette en caoutchouc est suspendue depuis un bon mois au rétroviseur de mon tacot qui se métamorphose en limousine une semaine sur deux. On l’a appelée « Chou Papier Toilette » parce que c’est le joli nom que lui a trouvé Bébé Lionceau et que cette figurine ne valait rien avant d’être collée par la grâce d’un coup langue au miroir qui se trompe de direction, et de devenir alors un colifichet au grand banditisme car Chou Papier Toilette est un vilain : il gronde les enfants qui font les andouilles sur la banquette arrière. Quand ça canaille sur le deux tiers un tiers, les yeux de Chou Papier Toilette deviennent tout rouges. On se marre bien dans ma limousine.

Limousine qui vient fatalement de redevenir tacot par la disgrâce d’une fin de dimanche pluvieux donc imper. Je reviens marron chez moi et d’ailleurs il y en a jusque dans mon tiroir à chaussettes, des petits marrons surprise qu’on a ramassés par paquets de cent mille au jardin. J’ignore si je dois rire ou rire.

Forçons-nous à rire et quoi de plus drôle que le métier d’enseignant ? Par exemple, le Directeur académique des services de l’éducation nationale du Gard, en vocabulaire terrien le chef de chez nous s’appelle M. Pathos. Ca ne fera rire que les collègues mais c’est déjà ça. Au hasard encore : la mère de mon petit élève M. s’est convoquée d’elle-même l’autre jour parce que M. est un peu comme moi : il est dans le rouge à chaque fin de journée. Alors on fait le point. Moi : M. est très fatigué, ben oui mais il ne dort pas. Ah d’accord c’est pour ça. Moi, très psy (6 années d’études supérieures) : il pourrait dormir un peu plus par exemple. Mais c’est pas possible parce qu’il n’arrive pas à s’endormir. Moi : alors il devrait regarder un petit livre avant de se coucher. Mais c’est pas possible non plus ça parce qu’il regarde la télé très tard. Moi : ben vous pourriez éteindre un peu plus tôt et lui montrer un livre mais ça aussi c’est impossible car M. joue à la tablette après la télé. On arrive quand même à négocier un peu moins de tout ça et puis ce n’est pas fini, j’apprends que M. dort dans un lit parapluie. Un lit parapluie ? Ce n’est pas pour les bébés ça ? Ben si mais il a peur dans son grand lit. Mais sa tête ne touche pas les parois ? Ben si. Mais ça aussi ça l’empêche peut-être de dormir ? Ah oui peut-être. On négocie de refermer le lit parapluie (je le refermerais bien avec M. dedans mais ça je le garde pour moi) et je demanderai demain à M. s’il a dormi dans son lit de grand. On parle un peu du travail, quitte à enfoncer une porte ouverte parlons boulot : M. n’aime pas du tout, mais alors pas du tout, mais alors carrément pas travailler. Ca je vous le fais pas dire Monsieur, de toute façon M. il veut faire comme ses deux tontons plus tard. Lueur d’espoir quand même et semblant d’intérêt : et ils font quoi du coup les deux tontons ? Ben, rien. Ah. Verdict, le travail, c’est sûr, M. le maudit. On évoque aussi les gros mots parce que moi même si je dormais dans un lit parapluie je n’insulterais pas les copains à longueur de journée et la maman de M. s’indigne: avant le CP, M. ne disait jamais de gros mots. D’accord c’est donc de ma faute (je commence à perdre patience, j’ai mes enfants qui attendent avec Mathilde à la maison, Mathilde c’est la baby-sitter, une crème, mais enfin une crème qui a quand même une vie). Non ce n’est pas votre faute mais quand même l’autre jour y’a un camion poubelle qui est passé dans la rue et M. s’est précipité à la fenêtre pour crier : « P…..de s…… de f……… de etc. de camion poubelle ». Dans cette phrase, « camion poubelle » n’est pas un gros mot, je ne soupçonnais pas que tout le reste puisse sortir de la bouche d’un enfant de 5 ans et la maman de M. a une explication : M. est de la fin de l’année. Là je ne vois pas le rapport mais mes enfants qui m’attendent à la maison et Mathilde qui a une vie quand même, Mathilde si tu lis ces lignes sache que tu es la meilleure baby-sitter du monde, bref j’abrègerai après avoir pu évoquer un peu l’agitation de M. en classe. M. est très agité. Vous voyez, bon, c’est pas dramatique, mais M. passe son temps à se retourner et à agiter ses jambes, ça fait du bruit, ça dérange sa voisine et ça dérange tout le monde. Je m’attends à ce que ce soit la faute du lit parapluie ou ma faute à moi à y être. Eurêka je n’y suis pour rien : ça tombe là, d’un coup sec, d’ailleurs je crois que je n’oublierai jamais ce rendez-vous avec la maman de M. ; si M. est très agité, ce n’est ni ma faute ni la sienne. C’est parce qu’il a des vers.

On se serre la main et on se promet de se tenir au courant. M. me dit au revoir Maître, je lui réponds au revoir M., ce n’est qu’un enfant finalement, un enfant qui n’a pas beaucoup d’aide. Ah oui mais un sacré client. Je me demande ce que Céline Alvarez ferait avec M.

Dans les yeux de M., je crois lire un début de réponse : Céline Alvarez, elle ferait ch…

Ca m’échappe.

Voilà, c’est ça qui m’attend demain. N’empêche, penser à tout ça en me remettant au travail me fait oublier la pluie. Et aussi que dans le rétroviseur, tout à l’heure, à côté de Chou Papier Toilette, il y avait les deux yeux sombres ou peut-être devenus tout rouges d’un joli petit garçon qui attendait que la limousine de son Papa disparaisse au coin de la rue. Oui car c’est sûr : ma limousine soudain sous-équipée a attendu d’avoir déboîté pour redevenir tacot.

Blog de Papa Lion – les paradoxes déconnent

Ca c'est un stylet stylé.
Ca c’est un stylet stylé.

Avant la réunion j’ai un moment d’intimité mais disons plutôt d’aparté pour qu’il n’y ait pas de malentendu car nul malentendu avec les parents de M., jamais de malentendu avec les parents de M, prenons nos gardes. Je les informe quand même : ce matin, mon stylet était en panne, impossible de faire fonctionner le tableau blanc interactif. Alors M. a analysé : ben ton stylo Maître il déconne alors je l’ai fait répéter et il déconnait encore le stylet alors j’ai appris à M. que déconner est un gros mot et qu’il valait mieux dire qu’il ne marchait pas ou mieux qu’il ne fonctionnait pas ou encore mieux qu’il dysfonctionnait. Et la maman de M. m’a rassuré : face à la stupéfaction tenace de M. le soir venu devant cette incohérence lexicale, le papa de M. a dit à M. que déconner était un gros mot à l’école et qu’il ne fallait l’employer qu’à la maison. Je ne déconne pas, c’est vrai, il le lui a vraiment dit. Je ne déconne pas.

J’ai un certain succès pendant la réunion avec mon tableau blanc interactif sur lequel je montre sans regarder ma montre à quoi ressemble une séance de lecture : le peuuu avec le aaaaa fait paaaaa et la plupart des élèves l’ont encapé sauf M. dont le père prend la parole, du coup ça sent un peu la bière et le tabac dans la salle de classe dans laquelle j’ai pris soin de ménager un courant d’air confère un précédent article.

« Et comment ben c’est pas à cause de votre tableau là ben comment que M., eh ben il arrive pas à déscotcher de sa tablette ? »

Je mords ma lèvre mais pas la poussière et ne lui réponds pas que c’est à cause de lui, la tablette, non, toujours professionnel je vante les mérites d’une pratique équilibrée des nouvelles technologies, j’utilise des mots simples sans illusion. Et puis je poursuis ma séance de lecture : avec le peuuu et le aaaaaaa on apprend à faire paaaaa et pa et pa ça fait papa, j’interprète des regards confiants, pas mal ce maître, et j’annonce fièrement que nous lisons les premiers mots : papa, papi, et fatalement pipe.

Le père et la mère de M. éclatent de rire. Pipe. Ils sont vraiment hilares, sourires gênés dans l’assistance. Bon. Problème de références, d’environnement social, intellectuel et là j’ai les fesses entre deux petites chaises de CP : on est l’institution et on aide car enfin ce n’est pas la faute de M. si ses parents boivent et fument à tel point que son cahier de liaison sent le tabac et la bière, il n’y est pour rien hein, et sans doute que ce n’est pas sa faute s’il insulte à tour de bras et qu’il parle sans cesse et que quand un stylo déconne ben M. le dit très fort dans la classe. « Maître il déconne ton stylo. ». C’est vrai moi j’ai été élevé sans gros mots parce que mes parents ont été élevés sans gros mots, dans les livres et la douceur, j’ai grandi avec des parents bien élevés et avec des livres et de l’attention et des rêves mais enfin y’a des moments où on craque et là j’ai envie de penser très très fort qu’ils pourraient faire un tout petit effort pour aider leur enfant. Mais non c’est mon boulot rien qu’à moi. Allez tous ensemble : ce n’est pas la faute des parents de M.

D’abord c’est un stylet, pas un stylo !

La réunion touche au but et donc à sa fin. J’oriente qui vers la responsable des activités périscolaires, qui vers l’orthophoniste, qui vers la sortie.

A peine plus tard je suis dans un bureau immense, trois salles de classe réunies, moquette blanche, bureau acajou, lampes design et bing je me mange une lampe design. Maître, elle déconne votre lampe. Enfin elle dysfonctionne. Enfin elle est trop basse quoi, on se fait mal ! Maman Lionne et moi signons une convention de divorce à l’aide d’un Bic bleu dysfonctionnant piqué à l’école. Je paraphe d’une main tremblante. Maître Truc, lui, montblante. Nous entérinons notre perte réciproque sans courir à notre perte et c’est là la magie du paradoxe et je me demande si un jour le paradoxe me foutra la paix.

Ben je suis triste et puis je m’égaye en pensant à vendredi. Je m’en fous de tout ça : je retrouve mes enfants vendredi.

Dans la rue je croise les parents de N. Attention à ne pas confondre M. et N. Tous ces parents-là picolent mais N. est roumain et ça c’est mon petit challenge parce que j’aimerais bien visiter Bucarest à l’œil. Ils ont rendez-vous devant le temple et c’est ça qui est magnifique dans une ville à tradition protestante peuplée de roumains à tradition templiste voire trappiste c’est qu’ils vont s’enquiller des bières devant le temple et qu’ils te le disent. Le père m’appelle Maître comme si j’étais son avocat à lampe trop basse et pourtant je ne suis que l’humble et incompétent Maître d’école de N., 1700 euros par mois, le nirvana pour les uns, Nirvana pour les autres. Alors je leur souhaite une bonne soirée, pourtant ils ne vont que boire des bières devant le temple et je ne suis pas sûr que N. saura ses voyelles demain. Je glisse quand même à son père que je prendrai N. en soutien et qu’il faudra signer un papelard, le père de N. signera tout ce que je voudrai. Je crois qu’il m’aime bien. Le temple me tend les bras mais non, je rentre chez moi et à demain, N.

Je m’en fous, je retrouve mes enfants vendredi.

La bienveillance – Blog de Papa Lion

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Lors de ma réunion parents-professeur de jeudi je promets sur la tête de mon tableau blanc interactif que le directeur fera court et qu’il y aura un courant d’air, de la fenêtre à la porte ou l’inverse.

C’est la réunion de grande section. J’y vais pour faire plaisir à ma fille et à sa maman parce que je sais déjà qu’on pratique la motricité tous les jours et la motricité fine tous les jours aussi. Au fait c’est quoi la motricité pas fine ? Ben la motricité large, la motricité bourrine, l’EPS, le sport quoi. Enfin on joue avec des cerceaux. Il fait chaud dans la classe et les deux maîtresses assurent qu’elles correspondent tous les mercredis (mon œil) et qu’elles entretiennent un cahier de liaison (mes fesses). Moi j’ai chaud je voudrais partir d’ailleurs je pars, présentant des excuses excessivo-maladroites à la maîtresse et demandant à un enfant passant par là où on peut se rafraichir un peu, voire s’asperger d’eau, foutue cagnasse, foutues salles exiguës, foutue situation. Je reprends ma place tout con tout confit tout confus, mon ex-femme qui n’est pas encore mon ex-femme me demande si ça va je dis ben oui, ça va. Mes genoux sont à l’étroit sous la table de maternelle, je préférerais une marelle avec Bébé Lionceau ou un baby-foot avec Grand Frère Lion mais ce ne serait pas bien vu d’autant que la directrice arrive. Elle nous parle de communication bienveillante mais elle n’est pas foutue d’ouvrir la fenêtre qui donne sur la rue, pourtant ça ferait un joli courant d’air bienveillant mais non, sans ouvrir le moindre carreau elle nous suggère de venir le samedi échanger. A propos de la communication bienveillante. Mais c’est pas vrai, ils tapent tous leurs enfants ou quoi ? Moi je suis bienveillant avec mes enfants, je les serre un peu fort parfois ça doit leur faire mal dans les côtes mais ils ne s’en plaignent pas. Je n’ai pas besoin de leçons de bienveillance, je suis bienveillant avec mes enfants et aussi avec mes 25 élèves et je suis même bienveillant avec leurs parents, et ça c’est méritant. Enfin l’autre jour dans la rue j’ai hurlé sur la mère d’A mais ils faut dire qu’elle n’était pas bienveillante avec le portail et qu’elle voulait appeler la police parce que son fils était à l’étude et qu’elle n’avait pas que ça à faire, attendre comme ça dans la rue. Je pense au contraire qu’elle n’a que ça à faire et comme ça l’ennuie que son fils étudie elle s’occupe en démontant le portail de l’école, bon d’accord je lui ai hurlé dessus, mais de façon bienveillante, après elle a juré dans une langue inconnue, j’ai juré aussi, on n’était plus très bienveillants mais et pour une fois ça m’a rendu service qu’elle ne parle pas français.

Il fait de plus en plus chaud, je sens la présence de la maman de mes enfants derrière moi, je sais qu’elle voudrait bien s’en aller elle aussi, on est cons aussi à y aller tous les deux.

Ca finit enfin, je m’offre une petite marelle avec ma fille, elle se marre, elle, elle a bien de la chance, elle, et moi aussi parce que son petit rire là, celui qu’elle a inventé pendant l’été ou qu’elle est allée pécher je sais pas où ben c’est pas qu’un rire, c’est de la bienveillance en barre pour son papa, je voudrais qu’elle rie de longue alors pour qu’elle rie un peu plus je demi-tourne sur « Ciel ». Si elle avait eu un élastique, je lui aurais appris la chaise. J’aurais inventé en tout cas parce que la bienveillance ça ne s’apprend pas le samedi matin avec la directrice, ça se passe par la main et par le rire.

Nous quittons l’école en pestant et en rigolant. C’est bon de pester et rigoler, c’est fédérateur. C’est malveillant pour la directrice mais c’est bon.

Il y a un fond de champagne sirupeux genre pas bon mais paraît-il bon quand-même alors je monte les escaliers et descends le champagne. On se reverra demain pour la réunion de Grand Frère Lion, on va se revoir alors je m’y revois un peu. Mais l’heure tourne, j’aurais bien aimé être bienveillant encore un peu. Mais non, je brise les côtes de mes deux enfants et puis  je pars.

 

Faire un métier sympa

Oh la belle école.
Oh la belle école.

J’ai dit que je ne voulais pas rentrer et on m’a ri au nez : deux mois de vacances et, jeudi, le marronnier auquel on n’échappe donc pas. Cette année je monte en première classe, celle où l’on apprend à lire, écrire et comptez pas sur moi pour oublier le fromage. Le CP c’est peu. J’espère que je ne vais pas leur marcher dessus.

Ben ils sont où les élèves ? Ah oui là devant moi. Je ne vous avais pas vus. Pourquoi vous avez tous le nez qui coule ?

Pendant ce temps, à l’autre bout de la ville, Bébé Lionceau et Grand Frère Lion, fourbus de vacances, fourbissent leurs armes avec leur maman. Ca doit coller de l’étiquette à tour de bras.  Si je n’ai pas les enfants à Noël, je me console en me disant que j’échappe aux étiquettes.

J’ai pensé ce matin qu’il fallait trouver un autre boulot, alors j’ai cherché. Y’a bien jardinier qui me plaît bien, jardinier c’est pas bien violent. La pression ? Oui alors peut-être la pression de l’échec, un peu comme au CP pour la lecture, on se demande si ça aura germé à temps. Bon. Je ne suis pas loin de penser qu’il ne se passe grand chose pour le jardinier s’il y a deux ou trois graines qui ne veulent pas « déclencher ». Ou fleuriste. Au moins ça a déjà poussé, le plus dur est fait, plus qu’à booker les bouquets. Il faut gérer les stocks ? Soit, ça ne doit pas être bien violent non plus ça, la gestion de stocks de fleurs, c’est pas comme un stock d’élèves de CP. Enfin je ne crois pas.

Ah oui mais le fleuriste n’est pas fonctionnaire et c’est quand même précieux la sécurité de l’emploi par les temps qui courent.

Quoi qu’il y a peut-être des fleuristes fonctionnaires ? Je me vois bien fleuriste fonctionnaire à l’Elysée, voilà, fleuriste de l’Elysée payé 10000 euros par mois.

Ou bien rien. Ne rien faire, tout en restant fonctionnaire. Tant qu’à rien faire, le faire à l’Elysée, tant qu’à faire. Voilà, j’aimerais être le mec qui ne fout rien de l’Elysée.

Bon. Il faut que je prépare mon casse-croûte pour demain midi.

(Bonne rentrée à tous les papas, les mamans, les enfants et les enseignants.)

Samedi soir sur ma Terre

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Papaoutai – ben là.

Comme il paraît que les traditions se perdent je m’efforce de les perpétuer et à défaut j’en instaure de nouvelles comme celle de dîner en musique quand il faut se rendre à l’évidence que c’est le dernier soir avec les enfants avant une longue semaine avec soi-même.

Nous établissons un ordre simple : Bébé Lionceau puis Grand Frère Lion puis de nouveau Bébé Lionceau et ainsi de suite, de suite.

Bébé Lionceau envoie du bois : elle demande un Papaoutai, comprendre un Stromae. En l’occurrence Papaoutai. Je suis entre eux deux et deux bouchées, on monte déjà sur la chaise et le cucul en arrière, c’est samedi soir sur la Terre. Je m’atterre puis joue le jeu puisqu’il est question de je, donc de moi. Bébé Lionceau met la paume vers le ciel et la monte au rythme du bon son, non mais je rêve ou quoi. Papaouquoi.

Au tour de Grand Frère Lion. Sans transition mais en transe et avec du son, c’est un petit Hugues au frais qu’il quémande. Mais je ne le trouve pas sur mon dix heures, alors à défaut le petit garçon demande Noël des enfants du monde.

Nous chantons donc Noël des enfants du monde et, accablé de questions, accablé tout court, attablé tout lourd, je lui explique la Palestine, les Chinois, les Juifs, les Musulmans, les athées. C’est indigeste. D’un geste Bébé Lionceau fait comprendre que c’est à son tour et ce sera un autre Papaoutai.

Nous écoutons une chanson qui n’est pas pour les enfants et les régale pourtant, je réprime les pieds sur la table. J’ai dit sur la chaise, il ne faut pas exagérer.

On écoute Alors on danse. Alors on danse.

Toute ressemblance avec des personnes existant s’explique par les gènes et si y’a de la gêne…Bref le petit d’Elle danse au son des basses sur sa chaise haute et je tente un « Je vous demande de vous arrêter » balladurien qui se perd entre Etterbeek et Laeken. J’ouvre une Heineken entre les tours de Bruges et Gand.

De nouveau le tour du petit Grand qui voudrait vraiment, mais alors vraiment qu’on écoute Ali ouante fort christ masse. Ca groove au 63 rue R.

Je manque de sommeil, je suis sans nuit, Bébé Lionceau s’ennuie sur All i want for Christmas. Faut dire que c’est limite pénible mais Grand Frère Lion bat le rythme avec son index et c’est quand même ça de pris. Je le soupçonne de croire encore au Gros Barbu, je la soupçonne, elle, de ne plus y croire et voilà que la fin du repas entre si proches approche. C’est à son tour et elle choisit la chanson des chansons, le titre qui la fait vibrer depuis toujours : Lola qui s’appelle en fait Morgane de toi. Grand Frère Lion me demande si la fille de Renaud s’appelle Morgane ou Lola et j’en perds mon lapin qui est partie trémousser son pyjama dans le salon.

Nous dansons un slow.

Le frêle à se taire chante que sa fille est la seule gonzesse etcétéra sans se démettre une épaule et moi je démets la mienne en tenant la mienne mais c’est bon quand même. Puis vient le moment de se brosser les dents, comprendre les lui brosser les siennes.

Elle me regarde de ses grands yeux tout ronds, ses yeux d’amour tout neufs, ses yeux de petite fille de quatre ans qui aime son Papa surtout quand il lui brosse les dents. Elle a un truc à me dire important, je le sens que c’est important parce que ses yeux sont encore plus ronds qu’à l’accoutumée mais elle ne peut pas parler la bouche pleine. Un truc par rapport à Stromae ou aux semaines alternées ou à l’école, je ne sais pas, elle crache un peu partout et je lui lave le joli visage. Je lui brosserai les dents aussi longtemps qu’elle voudra.

« Je vois pas de saletés dans ton nez quand tu me brosses les dents ».

Bon ce n’était pas essentiel mais je suis aise quand même c’est toujours ça de pris, aussi. Je prends tous les compliments.

« Je vois pas de saletés mais je vois des poils ».

Bon, au lit. Je chéris les traditions chéries.

L’ours Cannelle – Blog de Papa Lion

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Je suggère à mon fils de parler chiffons avec Honorette et Marie-Gwendolyne pendant que je vais chercher Bébé Lionceau devant sa classe. Devant sa classe, j’attends, il y a là queue des parents. Les enfants de rang élevé élevés au rang de ceux qui se mettent en rang saluent un à un la maîtresse et lui souhaitent de bonnes vacances. La maîtresse est radieuse : c’est vendredi et c’est vacances. Je connais ça. Il ne peut rien arriver de grave sur Terre à un professeur dézécol le vendredi des vacances au moment du lâcher d’élèves.

L’élève mal élevée sort en pleurant et sans saluer sa maîtresse qui pourtant m’assure qu’elle a passé une bonne journée et que ça y est, elle a des amis. Elle fait connaissance le jour des vacances, c’est bien ma fille tiens. A propos, c’est précédée d’un immense ours en peluche et bandoulière qu’elle franchit la porte de la classe. Ah oui sourit la maîtresse qui a oublié de nous prévenir : voici Cannelle et son carnet de voyage qu’il est à notre tour d’alimenter. L’ours Cannelle…Quel choix étrange et ma mémoire se met en branle, un vrai poisson rouge en Alzeihmer, je revois tout de même les images d’un feu ours ariégeois abattu il y a une quinzaine d’années pour s’être trop gavé de pyrénéens. C’était donc à Noël. Soit la maîtresse est chasseuse, ce qui n’est pas facile à dire, soit la maîtresse défend les animaux, ce qui est plus facile à entendre. Quoi qu’il en soit c’est un coup fumant.

Grand Frère Lion se chargera de prendre Cannelle et Bébé Lionceau en photo. Bébé Lionceau racontera à la rentrée ses vacances quatre étoiles avec la grande ourse. Il faudra des photos chez sa mère et des photos chez son père, elle va voir du pays, Cannelle, et ma fille racontera ses histoires gourmandes de retour à l’école. Des histoires de Cannelle au nid.

La ressemblance de Cannelle avec Portos est frappante. Portos c’est le doudou de toujours de ma fille, même marque et même regard triste, ce sont les mêmes. Bébé Lionceau m’explique qu’il n’y a pas de Papa, en revanche. J’ignore pourquoi je lui demande mais je lui demande pourquoi et ma fille m’explique que le papa de Portos est mort, ça me tue moi alors je lui dis que c’est trop triste ; ma fille me rassure : mais non, il n’est pas mort, c’est uste que la maman de Cannelle et lui sont uste séparés. Me voilà rassuré.

La réunion parents maîtresse – Blog de Papa Lion

tequilaLe plus dur dans le métier d’enseignant c’est les réunions parents professeurs de ses propres enfants. C’est comme le boulot, mais en plus pénible. La directrice n’a pas manqué d’indiquer ma profession à l’assemblée des autres parents et ça m’a mis mal à l’aise. Et puis elle a parlé de la charte de la laïcité et le malaise s’est accru quand elle m’a demandé, alors que je n’écoutais évidemment pas, « que pensez-vous de la laïcité Monsieur Lion » ? J’ai bredouillé « Ma foi… ». Ca commençait mal.

La maîtresse est super jeune et dynamique, je me demande comment on peut être aussi dynamique pour les parents à 17:30. Elle a passé des C’est pas sorcier à ses élèves toute la journée pour garder du jus, ou bien elle se drogue, ou alors elle est juste dynamique. Du coup j’ai essayé d’être dynamique lors de ma réunion à moi, devant les huit parents d’élèves (record battu) qui avaient eu la délicatesse de s’y déplacer, je ne suis pas sûr d’avoir fait aussi bien qu’elle. Ah si, quand la mère de je ne sais plus laquelle m’a informé que sa fille n’irait jamais à la piscine, là je suis devenu tellement dynamique qu’elle est partie et ils n’étaient plus que sept, nouveau record à battre.

La maîtresse de Grand Frère Lion avait préparé un powerpoint presqu’aussi dynamique qu’elle : il y avait des puces de partout et des fondus au noir godardiens. « La classe est sympathique, c’est une classe qui bouge un peu mais avec une bonne ambiance » : elle a du métier, celle-là je n’ai notée pour ma réunion à moi. On s’est souri Maman Lionne et moi quand elle a évoqué un de ses élèves qui lit le dictionnaire quand il a fini son travail, c’était de loin le meilleur moment de la réunion. Quand elle a parlé d’îlots j’ai rêvé de vacances mais quand elle a évoqué le cycle rugby j’ai pensé à mon fils, son dictionnaire à la main, broyé entre Kevin et Nolan. L’animateur s’appelle Fabrice et c’est le moment qu’a choisi la directrice pour m’extraire de mes rêveries : « Fabrice, vous le connaissez sans doute, Monsieur Lion ? ». C’est fou cette manie d’interroger les élèves quand ils bâillent. « Fabrice ? Oui, c’est un excellent pédagogue. » Je ne sais pas ce qui m’a pris : Fabrice, je ne le connais pas, sans doute un gros balaise qui va au contact comme on dit probablement dans le métier et qui va forcer mon fils à manger des fourchettes dans la mêlée. Lui qui ne sait même pas tenir ses couverts et qui déteste le contact.

Le powerpoint et les projets de l’année, c’était plutôt intéressant. J’ai cru que c’était fini mais elle a donné la parole aux parents pour la sempiternelle séance de questions réponses. J’ai noté sur ma petite feuille : « penser à ne pas donner la parole aux parents ». La pauvre, elle a eu des questions qui tuent. La meilleure a été « Et les récrés, ça se passe comment ? »

Mais comment peut-on répondre à ça ?

Elle a gardé son calme : « 2 adultes en permanence, sous le préau quand il pleut, c’est écourté quand il fait très froid et ça se passe plutôt bien.

– Non parce que ma fille l’autre jour elle m’a raconté… »

J’aurais voulu qu’elle réponde que les récréations durent plus d’une heure, qu’on fournit les pierres très lourdes pour qu’ils se les jettent à la tronche, qu’on boit des tequilas au chaud pendant qu’ils jouent en t-shirt sous la pluie et qu’on les désinfecte avec les fonds de verres.

Et puis la réunion s’est terminée. Grand Frère Lion nous a demandé ce que la maitresse nous avait appris, j’ai trouvé ça mignon. On ne lui a pas dit, pour le rugby, laissant le soin à la pédagogue de lui annoncer la bonne nouvelle.

J’ai raccompagné Maman Lionne et les enfants. Bébé Lionceau m’a demandé s’il fallait vraiment que je rentre chez moi. J’aurais eu besoin de pédagogie ou d’un powerpoint avec des puces. Mais il n’y a eu qu’un fondu au noir godardien.

 

La RAJE – Blog de Papa Lion

radio-papalion

C’est la musique d’aujourd’hui et de demain que le clone de son père écoute impassiblement et un peu trop fort dans sa chambre qui est aussi celle de sa sœur et ça c’est pas facile à faire entendre, moins en tout cas que RAJE FM, quel drôle de nom, RAJE FM 102.5, la musique d’aujourd’hui et de demain, single leitmotiv pour ne pas penser à hier et je crois que mon fils aux cheveux blondis par le soleil fonce en cette fin d’été. On cherche à s’échapper mais dans le salon c’est ma playlist largement inspirée ces derniers mauvais temps de RAJE FM et du coup c’est un peu la stéréo dans la maison devenue appartement par le truchement des choix de vie mais music is life. Tiens, du rap, ça n’empêche pas le petit grand garçon de chercher des mots dans son dictionnaire et j’espère qu’il n’y cherche pas les mots en uck et en itch de la chanson. Entre le yaourt et la pomme sa pomme fredonne un truc en yaourt, mais si tu connais, ça passe sur RAJE ! J’entends mais je ne vois pas. Dans sa barbe, Grand Frère Lion répète machinalement : RAJE, la musique d’aujourd’hui et de demain. Il n’a plus de CD mais il a la radio. On annonce les promos de rentrée à la Halle aux trucs, il s’impatiente : la pub, la pub ! C’est dans les gènes, mais revoilà du bon son et je lui fais remarquer que c’est pas de la musique de supermarché, ça, Pépère. Il me fait remarquer qu’il n’y a pas de musique dans les supermarchés et me demande pourquoi je l’appelle Pépère, soudain, ben je sais pas moi. Bébé Lionceau a un CD, elle : jamais on a vu jamais on ne verra la famille tortue etc. C’est de la musique d’hier ça ma poule, alors la grande petite fille ou bien c’est l’inverse car son père s’y perd me demande pourquoi je l’appelle sa poule. C’est vrai, me voilà bien familier depuis que la famille est dispatchée. Dyspatchée ? On lit Tintin tiens, ils sont bons les Dupont Dupond, plus nuls tu meurs, on rigole un coup c’est pas tous les jours, enfin si d’ailleurs c’est tous les jours et ça fait briller le soleil qui se couche de plus en plus tôt, foutue fin de mois d’août je ne t’ai jamais aimée. Le temps d’un câlin et ça prend un temps fou, le moyen garçon est à son poste : il rallume le poste qui nous rappelle le subliminal « RAJE FM, la musique d’aujourd’hui et de demain ». Sublime, Grand Frère Lion me dit avec la banane aux oreilles que c’est quand même du bon son, RAJE FM. Je lui suggère de surveiller mon langage.

Les boîtes vides

L’errance entre les matelas en mousse n’est pas de mon ressort. Je m’émousse entre les matelas à ressorts, cherchant à comprendre un certain nombre de choses qui touchent à la disposition des infinis articles de la fameuse enseigne suédoise, et à d’autres choses aussi telles que, allez, au hasard et entre autres, l’amour par exemple. Un enfant qu’une l’errance a rincée semblablement ou presque attire mon regard et je l’en détourne sinon c’est trois claques et les petites bonnes femmes en jaune ne me diront pas dans quelle allée je trouverais Brusali, déesse de la porte miroir et du panneau de fibre de bois imprimé, pourvu que je ne tombe pas dedans. Tout est à reconstruire et pour ça il faut d’abord construire, faire gazer la vicieuse visseuse qui tend plutôt à déconstruire. Dans les rayons des enfants je craque et j’achète des chiens en fibres de polyester et bien malgré moi mais enfin ça m’est venu comme ça je pense à Pauline Ester et que le rapprochement avec ma fille se fasse chez les Suédois me laisse pantois et pendu à mon iPhone sans message, dans ma poche mais sage. Qu’est-ce que je vais bien foutre de et dans ces armoires normandes et suédoises ? Ca vibre tiens, on me demande des nouvelles et je n’ai que des vieilleries à raconter que j’entasserai comme elles viendront, des vieilleries en cartons, mais pas en carton. J’achète un certain nombre de boîtes vides, con toutes ces boîtes vides me donnent le vertige, ma nature a peur du vide. Mes jambes se dérobent en retournant dans le rayon enfants (j’ai oublié les feutres pour Pauline Ester), c’est les médocs ou le Médoc, mon doc est en vacances et ses soins en villégiature, d’Hossegor à Arcachon y’a pas à dire j’étais mieux à voler sur un vélo. Quelle plaie grande ouverte au rayon libre service : j’ai une poêle dans la main, pas envie d’aller plus loin et pourtant la grosse flèche noir m’indique qu’il va bien falloir encaisser. Je prends un service 24 pièces, moi qui ai toujours détesté les puzzles me voici puzzled à mort, c’est marqué de partout « Nouvelle rentrée nouveau départ », je déteste le mois d’août et les publicitaires. Il est de bon ton de ne pas aimer les intérieurs Ikea tout en blanc : je plonge et ce sera immaculé, ou strié de bordeaux si je m’écharpe en montant tout ça à l’arrache et la rage.

 

Une phrase prononcée entre 3000 bières chez Ivan C. (salut poulet) revient à ma mémoire comme les souvenirs par milliers, tiens de qui était cette chanson ? Je ne cherche pas, peur d’être déç(h)u.

 

Il y a des plantes en pot et d’autres en plastique et enfin y’en a des deux c’est dégueu je trace ma route, tiens ça aussi ça me rappelle une chanson d’un con, je ne cherche même pas et je trace ma route à la hâte ; rien ne me presse mais tout m’oppresse. Tiens encore des boîtes vides avant les caisses. Y’a plus de place dans mon chariot qui charrie tiens pourquoi pas deux « r » à chariot ?

 

 

Je passe à la caisse et pour un con parce qu’avec toutes les casseroles que je traîne je suis quitte pour un certain nombre d’allers et retours, et puis je m’en fous. Dans Wikipedia et un moment d’oisiveté j’apprendrai que Pauline Ester est « tombée dans l’oubli avant d’effectuer un retour avec un best-of ». En bon best off je me réjouis pour elle en, bien sûr, m’en foutant un peu quand même. Dans le placard vide d’un appartement vide, je dispose soigneusement des boîtes vides.